Dans le cadre du programme des prépas littéraires, il est attendu de maîtriser un certain nombre de grands thèmes, dont celui de la relation entre les États-Unis et le reste du monde dans l’entre-deux-guerres. Cet article, présenté sous la forme d’un plan détaillé de dissertation, te permettra de comprendre les principaux enjeux que pose ce sujet.
Introduction
La caricature du docteur Seuss montrant l’Amérique faisant lit à part avec la vieille Europe et toutes ses misères est représentative de l’image isolationniste que l’on a des États-Unis de l’entre-deux-guerres.
Par cette période, il faut entendre pour les États-Unis 1919-1941, du fait de leur entrée retardée dans le Second Conflit mondial. Et, pourtant, il y a bien avec leur entrée en guerre ce retour en force dans les affaires mondiales, dont Pearl Harbor ne semble pas être le seul déclencheur.
Problématique
- Comment expliquer qu’en 1941, les États-Unis s’engagent résolument dans la guerre, avec comme objectif d’être sentinelle du monde libre (et d’en prendre bientôt la tête), alors que la période précédente semble être caractérisée par un refus progressif des États-Unis d’assumer ce rôle de leader mondial, allant jusqu’à l’isolationnisme au creux des années 1930 ?
- On peut prendre l’angle d’approche du reste du monde : alors que tous recherchent de plus en plus l’appui des États-Unis, comment expliquer que ceux-ci se dérobent ?
1919-1932 : de la volonté de proposer un nouvel ordre mondial au rôle de partenaire économique
La proposition d’un nouvel ordre international
Tout d’abord, la paix wilsonienne est une réponse au décret sur la paix des bolcheviks. Elle espère économiser six mois de guerre. Ce n’est pas une paix léonine et, en étant plus douce, elle espère être plus pérenne.
Elle se fonde sur 14 points, dont beaucoup de principes audacieux, si ce n’est novateurs (totale liberté des mers, plus de diplomatie secrète, Société des Nations, liberté des peuples à disposer d’eux-mêmes…).
Le maintien d’une présence économique forte
Même si l’Amérique amorce un retrait forcé pour des raisons internes (un « faux départ »), elle maintient une présence économique forte en dehors de ses frontières.
- Les raisons du refus de ratification de la Société des Nations (SDN) sont internes : le retour des républicains au pouvoir en 1918 a joué pour beaucoup. Il est avancé que la ratification signifierait une augmentation des impôts et donc un renforcement du pouvoir central qui est rejeté.
- Par ailleurs, la mise en place du triangle magique des réparations maintient une place économique à l’Amérique : les banques privées américaines (poussées en sous-main par le gouvernement) investissent en Allemagne. Cette dernière peut donc rembourser ses réparations, les vainqueurs européens peuvent donc rembourser aux États-Unis leurs dettes de guerre.
- La diplomatie du dollar désigne la prépondérance que prend la monnaie américaine dans tous les échanges internationaux.
Une garantie militaire recherchée, surtout par la France
Enfin, les Européens essaient à de nombreuses reprises de s’attacher à l’Amérique sur le plan militaire : le traité de Washington en 1922, le plan Dawes en 1924, le plan Young en 1929 (dans lequel ils font des concessions pour être sûrs de leur garantie), le pacte Briand-Kellogg en 1928 en sont des exemples marquants.
1932-1937 : le retrait effectif des États-Unis
L’Europe n’inspire pas confiance
À cette époque, une certaine méfiance s’exerce à l’égard de l’Europe, notamment car la crise économique généralisée touche toute l’Europe. Les Européens cessent alors de rembourser leurs prêts (la France propose l’annulation des dettes civiles sous prétexte de l’annulation des réparations militaires, ce qui est pourtant sans lien).
Des défis internes qui accentuent le repli
- La « peur du rouge » (red scare) dure depuis les années 1920 ; le procès Sacco et Vanzetti en 1927 en témoigne (il s’agit de l’incrimination très contestée d’anarchistes italiens du fait d’une méfiance pour les immigrés de gauche en général).
- La commission Nye 1934-1936, qui monte l’opinion contre le complexe militaro-industriel : elle affirme que les banques (surtout Morgan) auraient poussé l’entrée en guerre des États-Unis pendant la Première Guerre mondiale.
- Le mémorandum Clark 1930 (les États-Unis s’engagent à moins d’interventionnisme en Amérique latine et au retrait des troupes du Nicaragua en 1933).
Un certain isolationnisme, mais pas exempt de contradictions
- L’isolationnisme est bien réel : mise en place du tarif Hawley-Smoot en 1930 (augmentation de 30 % des droits de douane), lois de neutralité, dévaluation du dollar…
- Des exceptions demeurent cependant : la clause Cash and Carry 1937 et 1939 (permet aux Américains de vendre aux belligérants, à condition qu’ils paient au comptant et viennent embarquer leurs achats dans les ports américains).
1937-1941 : la réintégration des États-Unis dans les relations internationales
Une opinion américaine de plus en plus prête à la guerre
- La réélection de Roosevelt en 1936 apparaît comme un plébiscite et la majorité démocrate à partir de 1937 à la Cour Suprême va faciliter la remise en cause de l’isolationnisme.
- L’accueil des opposants ou des persécutés par les régimes totalitaires, comme Einstein ou Arendt, va de pair avec une conscience croissante de l’impossibilité de poursuivre dans cette posture isolée.
- Le sondage mené en 1940 reflète l’état d’esprit américain : à la question « Faut-il faire la guerre ? », la réponse est non, mais à celle « Pensez-vous que les États-Unis vont entrer en guerre dans les temps prochains ? », la réponse est oui.
Des prises de positions américaines de plus en plus fortes : leur isolationnisme ne saurait tarder à être officiellement rompu
- Le discours de la Quarantaine de Roosevelt en 1937 est vu comme en opposition avec le climat politique de neutralité et de non-intervention qui prévalait à l’époque aux États-Unis.
- La loi prêt-bail de 1941 pose l’Amérique comme l’arsenal du monde libre : elle autorise le président à vendre, céder, échanger, prêter le matériel de guerre et toutes marchandises aux États dont la « défense était jugée vitale pour la défense des États-Unis ».
- Des tensions avec l’Argentine sous influence nazie s’installent.
Finalement, la guerre trouve les États-Unis prêts à endosser leurs responsabilités
- Le mythe selon lequel Pearl Harbor aurait été l’unique déclencheur de l’entrée en guerre des États-Unis, largement diffusé par le cinéma hollywoodien, ne reflète pas la réalité.
- Le projet Manhattan qui commence dès 1939 en témoigne. C’est un projet de recherche du gouvernement américain dont l’objectif était de produire une bombe atomique au cours de la Seconde Guerre mondiale.
Conclusion
Si l’isolationnisme que l’on prête aux États-Unis sur la période de l’entre-deux-guerres est bien réel, il est nécessairement à nuancer pour expliquer la ferme entrée en guerre des Américains à partir de 1941.
En effet, on note une évolution de l’opinion américaine très nette au cours de la période : d’une fermeture opiniâtre au début des années 1920, à une résignation à la guerre. L’entre-deux-guerres des États-Unis est l’histoire d’une prise de conscience progressive du rôle phare dans les relations internationales qu’ils ne peuvent éviter de jouer compte tenu de leur hégémonie économique.