Méditerranée

Lors de l’épreuve de HGGMC ESSEC/EDHEC, il peut être bénéfique de réaliser un croquis relativement concis, si le sujet s’y prête. En effet, cela ajoute une réelle plus-value à la copie et peut permettre de gagner quelques points en se démarquant. Une méthode et des prérequis particuliers sont attendus pour ce type de réalisation. Ainsi, on te propose ici un format qui regroupe une proposition de croquis entièrement créé, accompagné de sa légende et d’une analyse de la situation dans la zone étudiée, te permettant de comprendre dans quels sujets utiliser ce croquis. Dans cet article, nous nous intéresserons aux enjeux de la Méditerranée orientale et des pays qui la bordent.

 

Le croquis et sa légende

La Méditerranée orientale en proie à l'explosion - CroquisMéditerranée orientale - Croquis légende

 

Présentation

Le croquis proposé est certes un peu complexe, mais il peut être mémorisé avec un travail sérieux et n’a pas besoin d’être aussi précis du point de vue des tracés. On peut également imaginer ne faire que deux des trois parties proposées dans la légende, ou bien même une seule, en fonction du sujet sur lequel on travaille.

 

Dans quels sujets l’utiliser ?

Ce croquis peut servir pour différents types de sujets liés aux thématiques suivantes.

Thématiques de deuxième année

  • L’Europe et ses voisinages
  • Le Proche et le Moyen-Orient
  • Les stratégies des puissances émergentes

 

Thématiques de première année

  • Le rôle et la gestion des espaces maritimes
  • La géopolitique des énergies
  • Les frontières
  • Les migrations

 

L’organisation du croquis en lui-même

Un croquis doit être visuellement « fonctionnel » et parfaitement limpide. Il ne s’agit pas de réaliser une carte ESCP très détaillée, mais plutôt de faire passer les messages clés par une légende simple. Les trois parties de la légende sont ici en lien et suivent le plan acteurs – contentieux – causes et enjeux (les deux dernières parties peuvent être inversées).

On observe que la première partie est dédiée aux figurés de surface pour situer les emplacements des acteurs et leurs particularités. La deuxième contient quant à elle des figurés de surface et ponctuels pour localiser précisément les zones conflictuelles. Enfin, la dernière partie montre à la fois les sources de puisement, mais aussi les flux qui sortent de la zone étudiée. Cela indique ainsi une projection vers ce que le croquis ne montre pas.

 

Les points essentiels à retenir pour comprendre les enjeux de la problématique

La Méditerranée orientale est une zone qui cristallise des enjeux majeurs et symptomatiques des problématiques géopolitiques contemporaines. Elle est un exemple à utiliser pour montrer sa connaissance précise d’une zone à échelle fine. Là-bas, de multiples facteurs d’instabilité se superposent et se rejoignent, le tout formant une toile complexe faisant barrière à une « pax mediterranea » (pour reprendre l’expression d’E. Macron).

 

Une zone marquée par la conflictualité 

À la croisée de deux ensembles géopolitiques

L’espace méditerranéen oriental est une interface entre deux continents où cohabitent des pays aux situations économiques et géopolitiques diverses. Il marque la jonction entre l’Union européenne et le Proche-Orient.

L’Union européenne est réputée pour être une « forteresse » géopolitique, balisée en partie par l’espace Schengen et au sein de laquelle le niveau économique des pays est bon. Les pays de la zone étudiée qui en font partie sont Chypre et la Grèce.

La Turquie est un pays de transit, un point de rencontre qui établit la liaison entre trois ensembles : l’Union européenne, le monde musulman et le monde turc. Puissance en affirmation, elle a de nombreuses revendications. Elle peut aussi utiliser sa position géographique comme levier géopolitique. Elle est appelée « pays carnivore », car elle veut grignoter son entourage en prônant les doctrines du panturquisme (pilier politique) et du pantouranisme (pilier culturel). Le pays joue de son rôle de pont pour que l’Union européenne continue de le considérer comme un interlocuteur majeur.

Enfin, des pays du MENA (Middle East and North Africa), où les contrastes économiques, les divergences de régime politique (États faillis, dictatures, « démocratures » et démocraties), les tensions culturelles et religieuses (ethnies, groupes terroristes…) et les ressources sujettes à accaparement entretiennent un climat de forte insécurité.

 

Des pays en crise

Certains États riverains de la zone sont emblématiques de ce que Bertrand Badie appelle le « cratère du monde », c’est-à-dire l’espace proche et moyen-oriental, marqué par une conflictualité encore vive et enracinée (zones de guerre chaude, tensions politiques avec une toile de fond religieuse et ethnique, stress hydrique, pénuries alimentaires et pauvreté).

À ce titre, la Libye et la Syrie sont deux pays à feu et à sang. En Syrie, c’est une guerre civile déclenchée par les printemps arabes qui fait rage. Celle-ci est alimentée par l’ingérence de la Russie, de la Turquie et de l’Iran liés par le Processus d’Astana. Les troupes turques sont également virulentes à la frontière nord. Elles luttent contre les actions des organisations kurdes considérées comme terroristes (PKK) et contre la création d’un potentiel Kurdistan.

Au Liban, les mécontentements de la population s’accentuent à mesure que le gouvernement, formé selon une logique confessionnaliste (partage des pouvoirs aux différentes religions), ne parvient pas à stabiliser la situation économique du pays ni à réconcilier les confessions. La jeunesse se révolte notamment et beaucoup de jeunes actifs quittent le pays.

Tout ceci entraîne nécessairement des flux migratoires qui transitent beaucoup par la Méditerranée, par la Turquie et par la Grèce. Cependant, la gestion de ces flux est rendue difficile pour la Grèce. Elle ne souhaite pas porter à elle seule ce poids au sein de l’Union européenne, tandis que la Turquie fait pression sur cette dernière grâce à la menace migratoire, et négocie ainsi dans son intérêt. Elle perçoit notamment les aides financières liées aux ASA en échange du maintien des réfugiés aux portes de l’Europe.

 

Laquelle est entretenue par des contentieux et des revendications

Liés au territoire

Chypre se divise en deux ensembles qui ne parviennent pas à s’accorder sur les politiques communes au territoire ainsi que sur la légitimité de la RTCN. En effet, la République turque de Chypre Nord n’est pas reconnue par la communauté internationale.

Ancien territoire de l’Empire ottoman, Chypre est confiée aux Britanniques en 1960, puis rendue indépendante. Toutefois, en 1974, un coup d’État local à Chypre advient pour rattacher l’île à la Grèce. Or, cette tentative donne à la Turquie un prétexte pour intervenir au Nord et annexer 30 % du territoire. Aujourd’hui, une frontière fermée et surveillée par l’ONU (ligne Attila) sépare les deux entités. Dans la capitale Nicosie, une frontière avec check-points existe dans les rues.

Cette situation engendre une conflictualité latente et permanente. Il y a des tensions plus ou moins virulentes selon les périodes, une réunification toujours souhaitée, mais jamais actée par refus bipartite.

Le conflit israélo-palestinien ne s’apaise pas non plus avec les actions du parti conservateur et orthodoxe de Nétanyahou, favorable à la poursuite de la colonisation des terres palestiniennes de Gaza et de Cisjordanie et à un durcissement des règles pour les communautés non juives. À l’inverse, le souvenir des « intifadas » palestiniennes consécutives reste vif. Actuellement, les contentieux s’accroissent encore, notamment sur la question de l’eau, et Israël et le Hamas sont de nouveau en guerre depuis quelques jours.

 

Liés au « merritoire »

La Méditerranée orientale est un espace dans lequel l’attribution des ZEE n’a pas été effectuée de façon à ce qu’elles soient clairement délimitées. De ce fait, des contentieux importants existent, notamment car la Turquie, qui n’a pas signé Montego Bay (1983), revendique l’agrandissement de son plateau continental et de sa ZEE vers les eaux grecques.

Pour ce faire, elle se rapproche de la Libye (livraison d’armes au gouvernement de Tripoli, malgré l’embargo européen) et mobilise ses troupes marines dans la zone pour faire pression. La Grèce possède historiquement une large ZEE, ce qui mécontente la Turquie. Tout ceci engendre une forte militarisation de la zone.

 

Conjointement aux enjeux des hydrocarbures

Des ressources

Si les puissances régionales convoitent les eaux orientales de la Méditerranée, c’est aussi et surtout car elles sont riches en ressources stratégiques exploitables. En effet, la découverte récente de gisements de gaz au large de Chypre, de l’Égypte ou encore d’Israël est source de conflit.

Les attentions sont donc autour du gaz et du pétrole. Israël a été le premier à en trouver et l’exploite déjà dans de gros gisements (Léviathan, Tamar). Il y en a aussi au large de Gaza, mais il n’a pas les moyens de l’exploiter. Chypre, quant à elle, partage sa ZEE en blocs, elle attribue les forages à différentes sociétés (Exxon Mobil, Shell). Cela reflète une grande convoitise de la zone par les acteurs privés, conjointement aux acteurs publics.

En Libye, les gisements sont proches des littoraux, ce qui est un avantage non négligeable. Toutefois, la production de pétrole est pour le moment déstructurée par la géopolitique du pays. Une ultime preuve que la présence de ressources et l’instabilité politique ne font donc pas bon ménage.

 

Des opportunités d’exploitation

Tandis que le projet de construction d’un gazoduc Eastmed (Accord de 2020) reliant Israël à la Grèce pour alimenter l’Europe se sculpte progressivement, le risque de guerre du gaz est élevé, surtout s’il n’y a pas d’entente sur le découpage des ZEE. Or, un désaccord persiste car la Turquie et la Russie rétorquent avec l’idée du Turkish Stream (projet Russie-Turquie-Europe). À noter que beaucoup de conduites passent par la Turquie (gazoducs TAP, TANAP, oléoduc BTC).

 

Conclusion

Finalement, cet espace est un carrefour géostratégique dans lequel on est confrontés aux conséquences de l’enjeu gazier et des tensions euroturques.

Tu peux utiliser ce croquis dans de multiples sujets, directement dans sa forme actuelle ou en ne sélectionnant (et en approfondissant de fait) qu’une ou deux parties de la légende.

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