graphique esh

Il peut parfois être pertinent dans une copie d’ESH d’incorporer une courbe dans tes raisonnements. C’est pourquoi je te propose de voir avec moi comment en utiliser certaines dans ta dissertation.

La courbe de Phillips

S’il y a une courbe qu’il faut retenir de tes deux ans de prépa, c’est bien celle-ci. Inventée par Phillips en 1958, cette courbe illustre une relation décroissante entre le chômage et l’inflation. Pour l’expliquer simplement : lorsque les salaires augmentent, le taux de chômage baisse, et lorsque le taux de chômage est faible, les salariés peuvent davantage négocier à la hausse les salaires ; hausse des salaires qui induit par la suite une hausse des prix (c’est l’inflation). Cette relation marche aussi dans l’autre sens, c’est-à-dire lorsque le taux de chômage est élevé, l’inflation diminue. Cette courbe permet d’établir théoriquement (on ne sait pas bien où le situer) un taux de chômage naturel qui correspond peu ou prou au taux de chômage n’accélérant pas l’inflation (NAIRU).

Voici la courbe que tu pourras tracer dans ta copie :

Cette courbe est utile dans tous les sujets qui touchent de près ou de loin aux déséquilibres (c’est-à-dire, chômage et inflation), mais aussi aux politiques économiques. Le sujet HEC 2016 « Les États ont-ils encore à arbitrer entre le chômage et l’inflation ? » (tu peux retrouver l’analyse du sujet ici) est l’exemple type d’un sujet où la courbe de Phillips est primordiale. 

Il n’y a malheureusement pas une unique manière d’utiliser cette courbe dans une copie. Toutefois, de nombreux économistes s’accordent à dire que depuis les chocs pétroliers des années 70, la corrélation entre ces deux déséquilibres n’est plus aussi visible du fait de nombreux facteurs (anticipation des ménages sur l’inflation, pression à la baisse sur les coûts de production, moins de pouvoir de négociation des salariés…). On parle d’ailleurs aujourd’hui d’aplatissement de la courbe de Phillips. 

La courbe de Laffer

La courbe de Laffer du nom de celui qui l’a théorisée en 1974 peut se résumer par la fameuse maxime : « Trop d’impôt tue l’impôt. » Cette courbe est assez simple à expliquer et à comprendre : au-delà d’un certain seuil d’imposition, les agents rationnels ne sont plus incités à travailler, ce qui finit par provoquer une baisse des recettes pour l’État (au sens de toutes les administrations publiques). La courbe de Laffer peut-être discutée empiriquement puisque l’on ne sait pas réellement où placer le taux d’imposition maximal. Certains économistes affirment que le taux de prélèvements obligatoires en France (qui est l’un des plus élevés au monde : 45 % du PIB en 2018 selon l’Insee) a dépassé ce seuil, ce qui aurait abouti par exemple au mouvement des Gilets jaunes. 

Voici la représentation graphique de la courbe de Laffer : 

Cette courbe peut-être mobilisée dans tous les sujets qui évoquent l’intervention de l’État. C’est le cas par exemple du sujet ESSEC 2019 : « Les prélèvements obligatoires nuisent-ils à la croissance et à la compétitivité ? ». La question du poids des prélèvements obligatoires est un débat très actuel en France et les concepteurs de sujet d’ESH raffolent de cette question. 

La courbe de Kuznets, courbe doublement utile 

La courbe de Kuznets fait partie de ces courbes qui peuvent s’avérer très utiles à placer dans ta copie d’ESH. En effet, il existe deux courbes dites de Kuznets : une, l’originale, qui porte sur les inégalités en fonction du niveau de développement, et une autre, sûrement la plus célèbre, qui concerne l’impact environnemental en fonction du développement. 

Les deux courbes sont des courbes en cloche, les indicateurs utilisés en abscisse et en ordonnée ne sont cependant pas les mêmes.

La courbe de Kuznets sur les inégalités en fonction du niveau de développement

Le fonctionnement de la courbe de Kuznets ci-contre est le suivant : on trouve en ordonnée, les inégalités mesurées par le coefficient de Gini et en abscisse, la croissance mesurée par le PIB/habitant (afin d’avoir in fine une mesure du développement). Cette courbe indique que dans les premières étapes du développement, typiquement la période préindustrielle, les inégalités augmentent avec la croissance car seulement une poignée de personnes jouit des ressources exploitées. À mesure que le pays se développe, son économie se base de plus en plus sur le capital humain (et non plus sur le capital physique comme dans la première phase), et donc les inégalités décroissent (meilleur niveau de vie, accès à une meilleure éducation, aux loisirs pour davantage de monde…), mais la croissance diminue elle aussi, d’où la courbe en cloche. 

La courbe de Kuznets sur l’impact environnemental en fonction du développement

 La courbe environnementale de Kuznets représentée ci-contre provient des travaux de Grossman et Krueger en 1994. Elle reprend exactement le même principe de fonctionnement que la courbe de Kuznets juste au-dessus mais est encore plus simple à comprendre. Dans la période d’industrialisation, on se soucie peu de l’impact environnemental et de la pollution que l’on crée, puisque la priorité est donnée à la croissance économique et au développement. Une fois un certain stade de développement atteint, une conscience environnementale naît et le pays possède alors les moyens et la volonté de réduire son impact environnemental et sa pollution, d’où la seconde phase de la courbe. 

Ces deux courbes restent cependant assez peu validées dans les faits. Il n’y a qu’à observer la situation réelle des différents pays pour s’apercevoir que ces deux courbes ne sont pas du tout réalistes. Par exemple, la France, qui est un pays bien développé, connaît un regain des inégalités fort ces dernières décennies. De même, un pays comme les États-Unis devrait selon la courbe environnementale de Kuznets être à l’étape où il réduit son niveau de pollution, et force est de constater que ce n’est pas réellement le cas aujourd’hui.

Ces courbes peuvent s’avérer utiles dans des sujets faisant intervenir les inégalités ou l’environnement au sens large ( c’est-à-dire pratiquement tous les sujets d’ESH ces dernières années). Si tu souhaites utiliser ces deux courbes dans tes copies, je te conseillerais plutôt de les inclure dans une partie où tu remets en cause leur validité empirique.

Conclusion

On a pu voir ensemble quelques-unes des courbes les plus importantes en ESH et qui peuvent venir embellir tes dissertations. Il est important de rappeler qu’il n’est pas obligatoire de tracer une courbe dans ta copie, elles restent facultatives mais peuvent être un véritable bonus si elles sont bien placées dans ton raisonnement. À noter aussi qu’il est facile de remettre en cause la validité empirique/statistique de ces courbes, c’est pourquoi il faut les utiliser avec parcimonie et ne pas se perdre dans ses raisonnements.