À la mi-septembre s’est tenu le sommet de l’OCS à Samarcande en Ouzbékistan. Alors que les géants chinois et russe sont de plus en plus opposés à l’Occident, ce sommet est l’occasion d’accentuer davantage leurs liens avec les pays d’Asie centrale. Bien que constituée de pays pauvres et enclavés, l’Asie centrale redevient un espace stratégique sous influence chinoise et russe.
L’Asie centrale, un carrefour stratégique
Avec la mondialisation, l’Asie centrale aspire à redevenir un carrefour géoéconomique
L’Asie centrale a été pendant longtemps un axe commercial majeur entre l’Asie et l’Europe. Les routes de la soie, développées en partie par la dynastie Han (206 av. J.-C.–220 apr. J.-C.), ont fait de l’Asie centrale une interface stratégique. Avec la mondialisation et l’affirmation de la Chine, l’Asie centrale aspire à redevenir un carrefour géoéconomique.
Depuis 2013 et le développement des nouvelles routes de la soie, la Chine ne cesse d’investir en Asie centrale. Par exemple, en 2019, la Chine a accordé un prêt de 10 milliards d’euros au Kazakhstan. Elle a œuvré aussi au développement de la ville de Khorgos, un port sec à la frontière kazakh, une initiative qui profiterait aux deux pays. Pour la Chine, ce port routier est un pilier des routes de la soie. D’autre part, le réseau ferroviaire génère un droit de transit et permettrait au Kazakhstan d’être un pays connecté.
Des ressources qui attirent les convoitises
Au-delà de sa position stratégique, l’Asie centrale présente des richesses qui attirent les grandes puissances. Le Kazakhstan demeure le pays le plus riche de la région avec 2/3 du PIB régional, notamment grâce à ses réserves en pétrole, charbon, gaz et surtout d’uranium (40 % des réserves mondiales).
Le Kazakhstan a pour l’instant réussi à jouer sur plusieurs tableaux : avec la Chine, la Russie mais aussi l’UE (son premier partenaire commercial). Outre le Kazakhstan, le gaz représente 50 % des exportations en Ouzbékistan. Par ailleurs, la mer Caspienne, dont le partage des eaux entre les pays riverains est effectif depuis 2018, regorge de richesses. En effet, le pétrole et le gaz caspiens représentent respectivement 3 et 5 % des réserves mondiales.
L’Asie centrale se retrouve malgré elle dans un jeu des puissances russes et chinoises
La Russie, un voisin qui inquiète autant qu’il fascine
Si l’Asie centrale n’est plus l’arrière-cour de la Russie, Vladimir Poutine s’efforce de maintenir son influence dans ces anciennes Républiques socialistes soviétiques dans le domaine sécuritaire et économique. En janvier 2022, une vague de protestations secoue le Kazakhstan, pays à forte minorité russe, les manifestants demandent un changement de régime.
Le président Tokaïev en appelle alors à la Russie dans le cadre de l’Organisation de sécurité collective (qui devait pourtant être activé uniquement en cas d’agression extérieure). La Russie a répondu favorablement à la demande du gouvernement kazakh et a mis un terme aux protestations. Néanmoins, cette intervention a profondément remis en cause la souveraineté du pays.
La guerre en Ukraine, un tournant pour l’Asie centrale
Aujourd’hui, tandis que Vladimir Poutine a annexé des territoires ukrainiens, les pays d’Asie centrale sont dans une situation complexe. S’ils n’ont pas voté en faveur des résolutions de l’ONU condamnant l’invasion en Ukraine, le Kazakhstan et l’Ouzbékistan ont envoyé une aide humanitaire à Kiev. Ces deux pays entretiennent une bonne relation avec l’Ukraine et ne souhaitent pas reconnaître l’annexion de la Crimée ni celle des provinces de Donetsk et Lougansk.
Cependant, cette position ambivalente semble dure à tenir à long terme. En effet, dans le domaine économique, le Kirghizistan et le Tadjikistan dépendent des importations russes de produits raffinés. Ainsi, malgré leurs liens historiques, les agissements de Vladimir Poutine inquiètent les pays d’Asie centrale.
Le rapprochement avec la Chine, un jeu gagnant-gagnant ?
Dans le cadre de son projet des routes de la soie, la Chine a investi en Asie centrale, les entreprises chinoises sont présentes dans le secteur minier, des transports et des hydrocarbures. Par exemple, 1/4 de la production gazière est sous contrôle des sociétés chinoises au Turkménistan.
Cependant, certains pays d’Asie centrale sont en train de tomber dans le « piège de la dette » chinois. En effet, la Chine détient respectivement 43 % et 35 % de la dette publique du Kirghizistan et du Tadjikistan. De plus, si la Chine est pour l’instant réticente à un total engagement dans le domaine sécuritaire, Xi Jinping a promis une coopération pour lutter contre le crime organisé et le terrorisme. Cet engagement occulte pourtant les soupçons de présence de minorités kazakh dans des camps au Xinjiang.
L’OCS, une organisation qui sert les ambitions russes et chinoises
Créée en 2001, l’Organisation de coopération de Shanghai regroupait initialement la Russie, la Chine, le Kazakhstan, le Kirghizistan, l’Ouzbékistan et le Tadjikistan. Elle s’élargit ensuite à l’Inde, au Pakistan et à l’Iran. Cette organisation à vocation politique, économique et sécuritaire n’est en aucun cas une alliance militaire.
Cependant, la Russie et la Chine y voient un moyen de contrebalancer les alliances occidentales et de s’afficher comme un groupe uni contre l’Occident.
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